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Modification des règles d’urbanisme en vue de la revente d’un terrain devenu constructible

Cass. Civ III : 18.4.19
18-11414

L’affectation d’un bien ayant fait l’objet du droit de délaissement par le propriétaire doit répondre au caractère d’intérêt général tel qu’il a été prévu lors de la mise en place de l’emplacement réservé.
En l’espèce, les propriétaires d’une parcelle de terre située dans un emplacement réservé par le Plan d’occupation des sols (POS) mettent en demeure la commune de l’acquérir par application de la procédure de délaissement (CU : L.230-1). La commune rachète le bien en vue de constituer une réserve destinée à l’implantation d’espaces verts. Le projet ne voit pas le jour. À la suite d’une modification des règles d’urbanisme rendant le terrain constructible, la commune revend le terrain 25 ans plus tard à une personne privée pour un montant 43 fois supérieur au prix d’acquisition initiale. Les propriétaires assignent alors la commune en paiement de dommages et intérêts. 
Pour mémoire, l’exproprié peut demander la rétrocession du bien si celui-ci n’a pas reçu dans les cinq ans la destination prévue par l’acte déclaratif d’utilité publique (Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : L.12-6). 
Selon les juges du fond, il n’a pas été établi qu’un arrêté d’utilité publique a été pris par la commune. Les requérants ne pouvaient par conséquent ni prétendre à la rétrocession du terrain ni à une indemnité compensatrice sur le fondement de l’article précité. 
La Cour de cassation rappelle qu’elle a déjà jugé que le droit de délaissement ne permet pas au cédant de solliciter la rétrocession du bien sur le fondement de l’article L.12-6.
En revanche, la Cour rappelle que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens (article 1er du 1er Protocole additionnel à la CESDH). Le refus de toute indemnisation consécutive à l’absence de droit de rétrocession constitue une ingérence dans l’exercice de ce droit, qui peut être justifiée par un but légitime : la disposition dans l’intérêt général du bien acquis. Cette ingérence doit impérativement être proportionnée au but poursuivi. 
La Cour retient que la commune, qui a modifié les règles d’urbanisme avant de revendre le terrain rendu constructible, a porté une atteinte excessive au droit au respect des biens des requérants au regard du but poursuivi.

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